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27/09/2006

Quand l’Afrique se soustrait à la marche du monde : de nouveau esclave?

Ce titre qui en dit long sur l'état et le devenir du continent noir, à l'heure de la mondialisation, n'est pas de moi. Le texte édifiant qui suit non plus. Il est signé par un journaliste canadien, d'origine malienne,  installé à Montréal. Quant à moi, je l'ai reçu d'un ami m'ayant chargé de le transmettre au plus grand nombre de personnes. Aussi, si vous  vous  intéressez, un tant soit peu, au sort de ce continent, vous comprendrez, en le parcourant, à quel point cet ami avait toutes les raisons de vouloir le partager. Le premier réflexe fut pour moi de l'envoyer, en document joint, à une bonne partie de mon carnet d'adresses. Par la suite, deux autres de mes amis journalistes responsables d'organes de presse ont décidé de le publier (je profite, d'ailleurs, de l'occasion pour les en remercier encore). Après coup, j'ai pensé que je pouvais, à mon tour, me servir de cette fenêtre, pour les mêmes raisons. Je vous laisse donc le découvrir. Bonne lecture.

 

Il arrive dans la vie qu’une conversation banale nous secoue pendant des heures, voire des jours. J’attendais tranquillement un ami au terminus d’autobus de Montréal quand un monsieur d’un certain âge a pris place à mes côtés avant d’engager l’une des conversations les plus enrichissantes de ma vie. Professeur d’études stratégiques dans un institut international, l’homme connaît le continent africain comme le fond de sa poche. Son analyse, son point de vue sur notre avenir, donne froid dans le dos. Et s’il vous plaît, ne sortez pas la rancune du «colon nostalgique». Lisez avec la tête et la raison ce qu’il dit. Je vous rapporte fidèlement ses constats :

« Cela fait maintenant plus de 25 ans que j’enseigne la stratégie. Dans ma carrière, j’ai eu affaire à des dizaines d’officiers et de hauts fonctionnaires africains. Je suis malheureusement obligé de vous dire ceci : du point de vue des études stratégiques, de l’analyse et de l’anticipation, je leur donne un gros zéro pointé. Nos stagiaires africains sont très instruits, ils ont de belles tenues militaires ou manient le français de manière remarquable, mais, dans les cours, ils ne nous apportent rien.

Tout simplement, parce qu’à ma connaissance, dans toute l’Afrique francophone, il n’y a pas un seul centre d’études stratégiques et internationales avec des vrais professionnels à leur tête. Je vais vous expliquer pourquoi je n’ai aucun espoir pour ce continent. Au moment où je parle, le monde fait face à trois enjeux principaux : l’énergie, la défense stratégique et la mondialisation. Donnez-moi un seul cas où l’Afrique apporte quelque chose. Rien. Zéro.

Commençons par l’énergie et précisément le pétrole. Tous les experts mondialement reconnus sont unanimes à reconnaître que d’ici 15 à 20 ans, cette ressource sera rare et excessivement chère. En 2020, le prix du baril tournera autour de 120 dollars. C’est conscients de cette réalité que des pays comme les USA, la France, la Chine, le Royaume Uni, etc. ont mis sur pied des task force chargés d’étudier et de proposer des solutions qui permettront à ces nations de faire main basse sur les ressources mondiales, de s’assurer que quoi qu’il advienne, leur approvisionnement sera assuré.

Or, que constate-t-on en Afrique ? Les dirigeants de ce continent ne sont même pas conscients du danger qui les guette : se retrouver tout simplement privé de pétrole, ce qui signifie ni plus ni moins qu’un retour à la préhistoire !Dans un pays comme le Gabon qui verra ses puits de pétrole tarir dans un délai maximum de 10 ans, aucune mesure de sauvegarde, aucune mesure alternative n’est prise par les autorités. Au contraire, ils prient pour que l’on retrouve d’autres gisements. Pour l’Afrique, le pétrole ne comporte aucun enjeu stratégique : il suffit juste de pomper et de vendre. Les sommes récoltées prennent deux directions : les poches des dirigeants et les coffres des marchands d’arme. C’est pathétique.

Ensuite, la défense stratégique. L’état de déliquescence des armées africaines est si avancé que n’importe quel mouvement armé disposant de quelques pick-up et de Kalachnikov est capable de les mettre en déroute. Je pense qu’il s’agit plus d’armées de répression intérieure que de guerre ou de défense intelligente. Pourquoi ? Parce que, comparées aux armées des nations développées, de la Chine, de l’Inde ou du Pakistan, les forces africaines rappellent plus le Moyen âge que le 21e siècle. Prenez par exemple le cas de la défense anti-aérienne. Il n’y a quasiment aucun pays qui possède un système de défense équipé de missiles anti-aériens modernes. Ils ont encore recours aux canons antiaériens. Les cartes dont disposent certains états-majors datent de la colonisation ! Et aucun pays n’a accès à des satellites capables de le renseigner sur les mouvements de personnes ou d’aéronefs suspects dans son espace aérien sans l’aide de forces étrangères.

Quelle est la conséquence de cette inertie ?Aujourd’hui, des pays comme les Etats-Unis, la France ou le Royaume-Uni peuvent détruire, en une journée, toutes les structures d’une armée africaine sans envoyer un seul soldat au sol. Rien qu’en se servant des satellites, des missiles de croisière et des bombardiers stratégiques.

A mon avis et je crois que je rêve, si les pays africains se mettaient ensemble, et que chacun accepte de donner seulement 10 % de son budget militaire à un centre continental de recherche et d’application sur les systèmes de défense, le continent peut faire un pas de géant. Il y a en Russie, en Ukraine, en Chine, en Inde, des centaines de scientifiques de très haut niveau qui accepteraient de travailler pour 3000 dollars US par mois afin de vous livrer des armes sophistiquées fabriquées sur le continent et servant à votre défense. Ne croyez pas que je rigole. Il ne faut jamais être naïf. Si la survie de l’Occident passe par une recolonisation de l’Afrique et la mainmise sur ses ressources naturelles vitales, cela se fera sans état d’âme.

Ne croyez pas trop au droit international et aux principes de paix, ce sont toujours les faibles qui s’accrochent à ces chimères. Je pense qu’il est temps de transformer vos officiers (dont 90 % sont des fils à papa pistonnés qui ne feront jamais la guerre et je sais de quoi je parle) en scientifiques capables de faire de la recherche et du développement. Mais, je suis sceptique. Je crois que ce continent restera enfoncé dans le sommeil jusqu’au jour où le ciel lui tombera sur la tête. Enfin, la mondialisation.

Malheureusement, comme dans tous les autres sujets qui ont fait leur temps, les stagiaires africains que nous recevons sont d’excellents perroquets qui répètent mécaniquement les arguments qu’ils entendent en Occident. A savoir, il faut la rendre humaine, aider les pays pauvres à y faire face. Vous savez, dans mes fonctions, il y a des réalités que je ne peux dire, mais je vais vous les dire. La mondialisation est juste la forme moderne de perpétuation de l’inégalité économique. Pour être clair, je vous dirai que ce concept à un but: garder les pays pauvres comme sources d’approvisionnement en biens et ressources qui permettraient aux pays riches de conserver leur niveau de vie.

Autrement dit, le travail dur, pénible, à faible valeur ajoutée et impraticable en Occident sera fait dans le Tiers-monde. Ainsi, les appareils électroniques qui coûtaient 300 dollars US en 1980 reviennent toujours au même prix en 2006. Et puisque l’Afrique n’a toujours pas un plan cohérent de développement économique et d’indépendance, elle continuera à être un réservoir de consommation où seront déversés tous les produits fabriqués dans le monde. Pour moi, l’indépendance signifie d’abord un certain degré d’autonomie. Mais, quand je vois que des pays comme le Sénégal, le Mali, le Niger, le Tchad ou la Centrafrique importent quasiment 45 % de leur propre nourriture de l’étranger, vous comprendrez qu’un simple embargo militaire sur les livraisons de biens et services suffirait à les anéantir.

Pour terminer, je vais vous raconter une anecdote. Je parlais avec un colonel sénégalais venu en stage chez nous, il y a quelques mois. Nous regardions à la télévision les images de millions de Libanais qui défilaient dans les rues pour réclamer le retrait des soldats syriens de leur pays. Je lui ai demandé ce qu’il en pensait. Il m’a répondu : « Les Libanais veulent retrouver leur indépendance et la présence syrienne les étouffe ». C’est la réponse typique de la naïveté empreinte d’angélisme. Je lui ai expliqué que ces manifestations ne sont ni spontanées ni l’expression d’un ras-le-bol. Elles sont savamment planifiées parce qu’elles ont un but.

Israël piaffe d’impatience d’en découdre avec le Hezbollah et puisque Tel-Aviv ne peut faire la guerre en même temps aux Palestiniens, au Hezbollah et à la Syrie, son souhait est que Damas se retire. Une fois le Liban à découvert, Israël aura carte blanche pour l’envahir et y faire ce qu’elle veut. J’ai appelé cet officier sénégalais il y a deux jours pour lui rappeler notre conservation. Malheureusement, il était passé à autre chose. Son stage ne lui a servi à rien.

J’espère vraiment qu’un jour, les Africains auront conscience de la force de l’union, de l’analyse et de l’anticipation. L’Histoire nous démontre que la coexistence entre peuples a toujours été et sera toujours un rapport de force. Le jour où vous aurez votre arme nucléaire comme la Chine et l’Inde, vous pourrez vous consacrer tranquillement à votre développement.

Mais tant que vous aurez le genre de dirigeants que je rencontre souvent, vous ne comprendrez jamais que le respect s’arrache par l’intelligence et la force. Je ne suis pas optimiste. Car, si demain l’Union africaine ou la Cédéao décide de créer un Institut africain d’études stratégiques crédible et fiable, les personnes qui seront choisies se précipiteront en Occident pour apprendre notre manière de voir le monde et ses enjeux. Or, l’enjeu est autre, il s’agit de développer leur manière de voir le monde, une manière africaine  tenant compte des intérêts de l’Afrique. Alors, les fonctionnaires qui seront là, avec un statut diplomatique, surpayés, inefficaces et incapables de réfléchir sans l’apport des experts occidentaux se contenteront de faire du ‘’copier-coller’’; ce sera un autre parmi les multiples gâchis du continent. Avant que vos ministères des Affaires étrangères ne fassent des analyses sur la marche du monde, ils feraient mieux d’en faire d’abord pour votre propre intérêt ».

Ousmane Sow (journaliste, Montréal)

27 juillet 2006

17:20 Publié dans Mon oeil | Lien permanent | Commentaires (1)

26/09/2006

Signes du temps

C’est sans grand intérêt, mais il me vient l’envie de revenir sur quelques anecdotes liées à l’actualité de ces dernières semaines. Comme ce show pathétique que nous a offert, lors de la grande messe de l’université d’été de l’UMP, le nonchalant rappeur dissident de la banlieue parisienne, Bruno Beausir, connu sous le nom de Doc Gyneco. L’on a vu donc celui-ci s’afficher, comme le veut la tendance "people" actuelle de la politique, au bras de Sarkozy, le bouillonnant ministre français de l’Intérieur, président du parti de la majorité et accesoirement candidat déclaré à la Présidentielle de 2007. On connaissait du rappeur aujourd’hui embourgeoisé et dont la carrière avance comme lui, à 2 à l’heure, les textes acides de ses débuts, son goût de la provocation et, surtout, depuis quelques années, son statut de rigolo de service sur les plateaux télé. On découvre au grand jour son opportunisme et toute l’étendue de sa bêtise, noyant sans scrupules, sous les volutes de ses prétendues convictions, les mémorables sorties de celui qu’il nomme avec une ironie douteuse, son « petit maître à penser »: le Kärcher, les expulsions intempestives et surmédiatisées, l’immigration choisie et j'en passe... On se demande contre quelle promesse, l’actuel locataire de la Place Beauvau s’est-il attiré les faveurs, ô combien dérisoires, de l’ex-enfant des cités? Un ministère ? La légalisation du cannabis ? Une opération tous azimuts de rachat de ses disques qui traînent dans les bacs? Je vous avais prévenu, ceci est vraiment le genre d’info sans intérêt qui, au mieux, fait juste sourire doucement.

Une autre info révélatrice d’une bêtise d’une tout autre nature, bien plus sournoise et pernicieuse, celle de la pensée que l'on formate et de la raison qui fout le camp. Cette fois, l'alerte nous est parvenue du conseil représentatif des associations noires de France (Cran) et le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (Mrap). De quoi est-il question? De l'édition 2007 du Petit Robert dont les deux associations réclament "le retrait pur et simple" pour sa définition des mots "colonisation" et "coloniser". Pour le premier le cher Petit Robert nous donne à lire ceci:"mise en valeur, exploitation des pays devenus colonies". Et le deuxième: "coloniser un pays pour mettre en valeur, en exploiter les richesses". Les deux associations appellent également à "la mise en place d'un groupe d'étude" afin de réfléchir à une autre définition des mots incriminés. Dans son communiqué, le MRAP dénonce "cette nouvelle tentative de réhabilitation et de glorification du colonialisme" et accuse le Petit Robert de "reprendre à son compte l'esprit de la loi du 23 février 2005 qui reconnaissait à la colonisation française un rôle positif". En ce qui me concerne, j’ai plutôt une pensée pour l'un de mes professeurs de français qui se donnait un mal fou à m'inculquer les vertus de la fameuse institution dont le rôle, faut-il le rappeler, est de nous éclairer et non de nous brouiller les esprits, déjà bien malmenés par la vanité, la folie des hommes, l'exclusion et l'intolérance ambiantes.

Pour finir, le 11 septembre dernier, l’on a commémoré comme il se devait, le cinquième anniversaire des terribles attaques terroristes qui ont pulvérisé les tours jumelles du World Trade Center et endeuillé l’Amérique. Avec leurs 3000 victimes dont des ressortissants de plus de 90 pays. Ce jour-là, l’ambassadeur des Etats-Unis au Kenya s’est rendu à Enoosaen, un petit village massaï du sud-ouest du pays aujourd’hui connu pour avoir fait don, peu après les tragiques événements, de 14 vaches au peuple américain. Par son geste que l’on peut observer de loin comme étant décalé, ce peuple de pasteurs dont la vache constitue le bien le plus précieux, la richesse essentielle de son économie traditionnelle, voulait témoigner son soutien et sa solidarité envers un autre peuple frappé par le malheur. Ni plus, ni moins. Un acte spontané et totalement désintéressé qui relève des valeurs culturelles de cette communauté, comme l'on en compte souvent chez ceux qui ne possèdent pas grand chose, mais pour lesquels il est pourtant naturel, de tout partager avec les autres. Et donc Monsieur l’ambassadeur a fait le déplacement, afin de remercier le village Massaï et ses habitants pour leur cadeau, qui n’a d’ailleurs pu être acheminé aux Etats-Unis pour « des raisons douanières et sanitaires ». Mais, surtout, pour annoncer l’octroi de 14 bourses scolaires – eh oui, pas 12 ou 20, mais 14, soit une pour chaque vache donnée- destinées à des jeunes originaires de ce village. La compassion, le respect de l'autre seraient-elles donc une simple question d'arithmétique? J’ignore ce que ces 14 futurs étudiants vont apprendre en Amérique. Plein de choses intéressantes, sans aucun doute. Mais une chose est sûre: la générosité et la classe, ils en ont naturellement à revendre et à distribuer par brassées, en l'occurence, aux autorités de la première puissance du monde.

00:15 Publié dans Mon oeil | Lien permanent | Commentaires (0)