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04/03/2023

Je te vois

Arrête de douter de toi et de tout, nom de dieu! Plonge un instant ton regard dans le mien et tu verras combien tu es sublime! Connais-tu seulement ta valeur? Sais-tu combien, parmi ceux dont l’esprit tutoie les cieux, seraient prêts à vendre leur âme au diable, pour être simplement à tes côtés? Je ne te dis pas ça pour te consoler, non! C’est juste ce que mon cœur et mes yeux perçoivent. Certes, ce miroir où se reflète ton visage se voile quelquefois, lorsque le soleil brille trop fort et que les larmes viennent lui brouiller l’horizon. Mais il n’en est pas moins un écrin pour les diamants bruts, un refuge cinq étoiles pour les âmes en peine. C’est aussi un détecteur de mines antipersonnelles sur un terrain vague, une alerte de pluie de météorites fonçant droit sur la terre une nuit de pleine lune. Je te souhaite bien du courage pour affronter la migration des estragons pendant que la mer se vide. Ne me remercie pas, tout le plaisir est pour moi. Laisse partir ceux qui veulent sortir de ta vie. Dis toi que leur présence, longue ou fugace, n'est rien qu'une expérience parmi d'autres sur ton chemin. N’oublie pas de leur dire merci pour t’avoir épargné, peut-être, d'avoir un jour, à leur indiquer la sortie. Ouvre grand, portes et fenêtres et hume le parfum du matin. Salue le soleil, souris et incline-toi de gratitude devant l’infini. Profite de la seconde ultime d’éternité où tout se joue, pour entonner la mélodie des survivants. Accroche toi, même aux branches des arbres qui dansent sous le vent. Ose. C’est quitte ou double. Mais comme on dit, qui ne tente rien n’a rien.

 

15:45 Publié dans Mon oeil | Lien permanent | Commentaires (0)

01/03/2023

Prêt pour le grand départ 

Cinq ans, jour pour jour, depuis que tu es parti rejoindre les anges. J'espère qu'ils t'ont bien accueilli, que tu fais désormais parti des leurs. Et que ton magnifique regard et ton sourire enjôleur participent pleinement à l'éclat du firmament. Voici quelques lignes jetées sur le papier peu après ton départ. Elles me sont restées entre les mains comme une relique. Je les ai relues quelques fois, le cœur noué, sans jamais réussir à les partager. Comme si dans ce monologue improbable te mettant en scène face au mal qui t'as emporté, tu m'avais subrepticement demandé de prendre mon temps. D'attendre d'être apaisée face au vide et le manque de toi avant de faire entendre ta voix. 

 

Prêt pour le grand départ   

Viens, viens, qu’attends-tu ? Viens chercher ta pitance quotidienne, vieille crabe de malheur. Pas la peine de ralentir le pas, comme si tu avais un peu honte. Comme si tout d’un coup, tu éprouvais des remords! Viens grignoter mes poumons, bouffer mon foie à pleines dents. Viens Manger ma chair, ronger mes os. Viens m’empêcher de respirer, de bouger. Viens me tuer à petit feu.

Pourquoi ce cinéma, puisque tu es à présent bien installé dans tout mon corps? Tu y es à ton aise comme si tu étais chez toi.Tu exultes de me voir souffrir, tu triomphes tel un commandant de bataillon devant le corps inerte de l’ennemi. Des heures comme des mois, des jours comme des années. J’ai fini par m’habituer à ton insoutenable présence. Je sais que mon sort est scellé, ne t’inquiète pas. 

Tu l’ignores peut-être mais, malgré ma frêle allure, je suis un vaillant soldat. Et je suis déterminé à me battre, vaille que vaille, jusqu’à mon dernier souffle. C’est une question de principe. Rien n’est grave finalement.Tout va plutôt bien, malgré les apparences. Vois-tu, j’ai déjà pris mes dispositions. J’ai même réussi à coucher sur papier mes dernières volontés.

J’ai pris le soin de dire à tous ceux que j’aime, combien je tiens à eux: ma femme, mes enfants, mes amis et tous mes proches. Je crois que je n’ai oublié personne. J’ai l’esprit serein, le cœur léger et déjà la tête dans les étoiles. J’attends juste le hurlement du grand vent qui m’emportera loin de ce monde. Car, je sais que là où je vais je ne serais ni seul ni malheureux.

Mon âme s’habituera  très vite à la compagnie de celles des morts. Je me nourrirais de tout l’amour que je laisse derrière moi. Je serais au calme, délivré des affres de ton acharnement impitoyable. Je n’aurai plus besoin de faire semblant d’aller bien. Je serais libre, enfin! Touché par la grâce. Heureux.

Et te voilà ce matin planté droit devant moi, vêtu du sinistre manteau de la mort. A l’heure où certains s'apprêtent à prier dieu et d’autres le diable. Où la rosée perle sur la végétation qui se balance au gré du vent.Tu n’as même pas la délicatesse de me laisser faire mes adieux correctement. Mais peu importe. Fais ce que tu veux. Je t’ai déjà dit que j’étais prêt. 

Il ne me reste plus désormais que quelques secondes. Aussi, à toute vitesse, le film de ma vie défile dans ma tête: mes joies, mes peines, mes amours, mes erreurs, mes échecs, mes réussites. D’un geste de la main, je salue une dernière fois le soleil qui s'apprête à inonder de ses premiers rayons la terre que je quitte. Et puis je ferme les yeux doucement. Et c’est fini.